De quoi musée est-il le nom ?
Musée n’est pas une appellation protégée. Celle de « musée de France » permet de dresser des caractéristiques objectives communes (collections, inventaire, non lucrativité, accueil des publics…) et de recenser les musées qui y répondent. Mais il existe de nombreux établissements qui justifieraient de cette appellation et ne la demandent pas. Et d’autres qui n’en remplissent pas les critères mais s’appellent « musées », parce que c’est sérieux et attire des visiteurs, preuve que musée est un terme désirable, même si parfois on le trouve aussi « poussiéreux ».
De quoi musée est-il donc le nom ?
L’actualité nous invite à ce questionnement. On devrait dire plutôt les actualités, tant notre milieu professionnel est sous ses feux en ce moment :
- la « nouvelle » définition des musées qui revient en débat au sein de l’ICOM, retravaillée par un comité ad hoc. On se souvient de la sidération qu’avaient provoqué il y a un an les termes proposés pour redéfinir un musée et ceux relégués en second plan : collections, éducation, plaisir… ;
- la « décolonisation » des musées fait l’objet de nombreux travaux universitaires et est aussi devenu l’une des thématiques centrales de l’ICOM international, en lien avec la « nouvelle définition », précédée d’un rapport où l’on peut lire que : « les musées occidentaux n’ont été créés que pour abriter les pillages coloniaux » (merci à Krzysztof Pomian de rappeler la chronologie de l’histoire des musées dès le premier tome, juste paru, de son œuvre monumentale Le Musée, une histoire mondiale) ;
- les Restitutions, sur lesquelles se penchent en cet automne députés et sénateurs, autour d’un projet de loi permettant le retour de 26 objets issus de prises de guerre au Benin et au Sénégal. Au-delà du respect d’un engagement présidentiel, la riche réflexion conduite à l’occasion de ce débat parlementaire pose les questions de fond concernant la provenance des collections, leur conservation, les relations professionnelles avec les pays d’origine, les enjeux de la diplomatie culturelle, le sens de la loi française et en particulier l’inaliénabilité et l’imprescriptibilité des collections publiques, etc… ; »
- le mouvement Black Lives Matter et à sa suite, le « déboulonnage » de statues témoins de l’esclavage et de la colonisation ou le descellement d’un objet funéraire au musée du quai Branly-Jacques Chirac.
De quoi musée est-il le nom à l’heure de la Covid-19 ? Après deux décennies d’incitations pour attirer le plus grand nombre de visiteurs, que devient la « démocratisation » de l’accès pour tous face aux règles de distanciation ?
De quoi musée est-il le nom quand le concept d’universalité est remis en question dans une grande partie du monde des musées ?
De quoi musée est-il le nom à l’heure du numérique, quand le musée vient à soi sur un écran ?
De quoi musée est-il le nom à l’heure de la mondialisation ? Le Louvre à Abu Dhabi, le centre Pompidou à Shanghai, … le nom du musée est une marque et le musée se déplace au moment-même où l’on s’interroge : la place d’un objet, est-ce là où le plus grand nombre de visiteurs le voit ? là où il est le mieux conservé ? Là d’où il vient ?
A ICOM France, ce qui nous frappe au cœur de ces débats, c’est le désir très vif des professionnels d’être acteurs des transformations à l’œuvre et, notamment, de travailler sur les sujets sensibles. Que l’on parle de « réserves » ou de « provenance » des collections, nous entendons des responsables qui aspirent à pouvoir travailler sur ces objets, les documenter, les montrer, en faire récit, contribuer ce faisant à l’écriture d’une histoire partagée.
C’est l’enjeu d’une soirée-débat « déontologie », organisée en étroite collaboration avec l’INP, de mettre en valeur ces compétences et d’inviter à les mobiliser.
Cette séance est organisée en direct sur une plateforme numérique et se tiendra simultanément en français, en anglais et en espagnol.
Programme de la séance
Ouvertures
- Charles Personnaz, directeur de l'Institut national du patrimoine
- Juliette Raoul-Duval, présidente d'ICOM France
Intervenants
- Nathalie Bondil, vice-présidente du Conseil des Arts du Canada
- Bruno Brulon-Soares, président d'ICOFOM
- Luc Eekhout, directeur du Stichting Kasteel Heeswijk - ancien président d'ICOM Pays-Bas
- Ariane James-Sarazin, directrice adjointe du musée de l'Armée
- Emmanuel Kasarhérou, président du musée du quai Branly - Jacques Chirac
- Charles Personnaz, directeur de l'Institut national du patrimoine
- Yannick Lintz, directrice du département des Arts de l'Islam, musée du Louvre
Débat modéré par Juliette Raoul-Duval et Hélène Vassal
Conclusion : Christian Hottin, directeur des études de l'Institut national du patrimoine
Liens vers la séance Zoom
Pour nous rejoindre : lien vers la séance
ID de réunion : 896 6493 5894
Code : 063496