Préparation des réouvertures des musées
Pour préparer une concertation avec le ministère de la Culture prévue le 12 février conjointement avec d’autres associations professionnelles, ICOM France a effectué une consultation « flash » de ses membres institutionnels et de ses collègues d’ICOM à l’international. ICOM France remercie vivement les nombreuses institutions qui ont répondu ; nous vous proposons ci-dessous une analyse synthétique des réponses reçues. Nous continuons d’exploiter ces réponses qui feront l’objet d’une prochaine synthèse.
Panel
La consultation a porté sur ses membres institutionnels (et non pas les membres individuels) d’ICOM France et ses homologues présidents des ICOM nationaux en Europe. Ont été prises également en considération l’enquête de NEMO et les recommandations de l’ONG ICOM International.
Les réponses françaises concernent environ 97 musées, très majoritairement en région. Dans les grandes villes les réponses viennent des musées parisiens et marseillais.
Les réponses des homologues internationaux concernent 26 pays d’Europe et en plus Israël.
Méthode
Il ne s’agissait pas d’un questionnaire fermé mais d’une invitation faite aux membres institutionnels de donner leur point de vue principalement sur trois questions préalables aux réouvertures prochaines : l’accueil des scolaires, les amplitudes horaires et les modalités de pré-réservation ou, plus largement, de contrôle de flux de visiteurs.
Les institutions consultées étaient invitées à s’exprimer librement sur toute question qui leur semblait importante dans cette période. Les répondants expriment une grande satisfaction d’être consultés et apportent beaucoup de remarques spontanées et de recommandations. De ce fait, l’interprétation de leurs réponses est autant qualitative que quantitative et nécessitera une exploitation plus détaillée.
Les homologues à l’international étaient invités à exposer la situation dans leur propre pays : état sanitaire de leur pays, ouverture ou fermeture des musées, le cas échéant protocoles en vigueur, état du dialogue entre les musées et leurs gouvernements, perspectives.
Premiers enseignements
Concernant les réponses des musées sur le territoire national, on peut tirer les informations suivantes :
- Les musées concernés sont prêts et préparés à leur réouverture. Ils ont rôdé des protocoles sanitaires très rigoureux et sont en état de les réactiver, voire, si cela est demandé, à les renforcer. La jauge de 10 m2 est bien acceptée, les distanciations et gestes barrières et d’hygiène sont en place et pleinement acceptés. Les délais annoncés pour recevoir à nouveau des publics sont courts, la plupart entre deux et cinq jours, parfois une semaine, délais nécessités surtout pour la mobilisation et l’organisation des équipes.
- L’accueil des scolaires est considéré comme une priorité par la quasi-totalité des répondants. Beaucoup ont mis en place depuis le début de la pandémie des dispositifs « hors les murs », ceux-ci perdurent. La plupart des institutions sont prêtes à envisager des horaires différenciés pour pourvoir accueillir les scolaires (et jouer un rôle dans l’« hiver apprenant ») : par exemple, matinées réservées aux écoles et après-midi aux individuels, ou alternance de scolaires en semaine et de famille et individuels le week-end. Beaucoup associent aux scolaires les « publics empêchés ». La préoccupation est plutôt de retrouver ses publics : les freins semblent relever davantage des enseignants et des rectorats, ou des conditions de transport.
- Les horaires d’ouverture : tous ont déjà intégré le couvre-feu dans leurs prévisions. S’il faut modifier les horaires, ils y sont prêts, c’est de l’ordre de la négociation collective. Aucun horaire idéal ne se dégage des réponses, certains peuvent n’ouvrir que des demi-journées ou certains jours de la semaine. L’idée que réduire les horaires réduit les flux est loin de faire l’unanimité : au contraire, certains pensent que c’est l’augmentation de l’amplitude qui permettra l’étalement des flux de visiteurs.
- Les dispositifs de pré-réservations/billetterie en ligne, etc. : cette question suscite de nombreuses remarques. Les musées qui ont répondu, en région voire en zone rurale, considèrent que la problématique de flux de visiteurs à contenir ne les concerne pas. Avec parfois moins de 30 visiteurs en temps normal dans une journée d’hiver, ils s’estiment en dessous des jauges et en capacité de contrôler sur place les respects des distances.
Sur cet aspect, les commentaires sont nombreux : certains rappellent que 80 % des musées sont en région et ce sont d’ailleurs ceux-là, logiquement, qui ont le plus répondu. Ils considèrent que les inquiétudes ou les arguments manifestés dans les débats publics sur la réouverture des musées concernent très majoritairement les musées des grandes villes, susceptibles de drainer des foules et de générer des brassages, ce qui n’est pas leur cas. Ils sont sensibles à l’attention qu’on leur porte par cette enquête. Plusieurs suggèrent que l’on rouvre en priorité les musées de région, dont la principale préoccupation est de retrouver leurs publics.
Chez nos partenaires européens, les situations sont contrastées ; sur les 26 réponses recueillies, 14 proviennent de pays dont les musées sont fermés, 12 de pays dont les musées sont ouverts.
Ce qui est intéressant est que les questions sont largement les mêmes d’un pays à l’autre : place des scolaires, jauges et protocoles, conscience du rôle éminent des musées pour la reconstruction du lien social. Les musées de par le monde forment de ce point de vue une communauté très homogène et soudée, prête à l’entraide comme le démontre la réactivité pour répondre à notre interpellation. Les réponses sont détaillées, explicites, et nécessitent un délai pour être finement analysées. Nombreux sont ceux qui ont envoyé les protocoles prescrits par leurs autorités et ceux-ci méritent d’être comparés plus en détail. On effectuera cette comparaison dans les jours à venir.
Un point frappe dans les retours des pays, c’est la place très grande accordée à la situation des personnels (employés, travailleurs, selon les langages), parfois au moins aussi détaillée que celle donnée aux publics.
Un autre point est le rôle confié aux dirigeants des musées dans la décision de leur réouverture. La préconisation d’ICOM le formule ainsi : « il est recommandé que les musées qui ne sont pas en capacité de répondre à ces mesures prolongent leurs fermetures ».
Concernant les autres recommandations d’ICOM, on relèvera (un peu en vrac) les suivantes :
- Envisager des ouvertures prolongées
- Envisager des heures d’ouverture réservées à certains groupes, (par ex + 65 ans)
- Suspendre les installations qui impliquent une interaction du visiteur
- Réserver les ascenseurs aux personnes à mobilité réduite
- ...
En conclusion
Prêts pour la réouverture, disposés à la mise en place de toute mesure le permettant, conscients de leur rôle vis-à-vis des scolaires et soucieux des freins à leur retour, demandeurs d’une prise en considération de leurs spécificités locales, telles sont les premières considérations qu’expriment les membres de l’ICOM consultés. Une analyse approfondie de leurs réponses mettra en lumière sans nul doute des propositions très précises.